jeudi 19 mars 2015

Ordonnance du Conseil d’État du 30 janvier 2015 n°371415


 Une douzaine de départements exerce un recours en excès de pouvoir contre la circulaire du 31 mai 2013. Cette circulaire prévoyait au magistrat du parquet d'affecter de manière provisoire les mineurs isolés étrangers (MIE) dans les départements. Le choix du département allait être guidé par le point 3 de cette circulaire : « le choix du département définitif sera guidé par le principe d'une orientation nationale » qui « s'effectue d'après une clé de répartition correspondant à la part de population de moins de 19 ans dans chaque département ». A charge pour le parquet de saisir ultérieurement le juge des enfants.

Dans un premier temps, le Conseil d’État constate le caractère normatif de la circulaire : " le recours formé à l'encontre des dispositions impératives à caractère général d'une circulaire ou d'une instruction doit être accueilli si ces dispositions fixent, dans le silence des textes, une règle nouvelle entachée d'incompétence ou si, alors même qu'elles ont été compétemment prises, il est soutenu à bon droit qu'elles sont illégales pour d'autres motifs ; qu'il en va de même s'il est soutenu à bon droit que l'interprétation qu'elles prescrivent d'adopter, soit méconnaît le sens et la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu'elle entendait expliciter, soit réitère une règle contraire à une norme juridique supérieure ". En effet, il relève l'absence de critères législatifs encadrant la décision d'affectation du MIE. En effet, les articles 375-1 et suivant du Code civil disposent que la décision du juge des enfants doit prendre en considération l'intérêt supérieur. Le Code civil relaie la protection juridique accordée aux enfants par la Convention internationale des droits de l'enfant du 28 janvier 1990.

Dans un second temps, le Conseil d’État va contrôler la régularité de la circulaire avec l'article 64 de la Constitution et l'article 5 de l'ordonnance du 22 décembre 1958. Selon l'article 5 de ladite ordonnance valant loi organique, "Les magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l'autorité du garde des sceaux, ministre de la justice. A l'audience, leur parole est libre". Or, l'article 64 de la Constitution consacre le principe d'indépendance de l'autorité judiciaire dont les magistrats du parquet font indéniablement parties. La fonction de parquetier revêt un paradoxe entre sa prétendue indépendance et sa soumission à une hiérarchie dont le sommet n'est autre que le garde des sceaux.

Le Conseil d’état conclut que " le garde des sceaux ne saurait prescrire aux magistrats du parquet, lorsqu'ils prennent une ordonnance de placement provisoire, de statuer dans un sens déterminé ou en fonction d'un critère qui ne serait pas conforme à la loi". 

Lien de la décision 


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