lundi 16 février 2015

CIVIL/ MARIAGE HOMOSEXUEL Arrêt dit du « mariage franco-marocain entre personnes de même sexe » n° 96 du 28 janvier 2015 (13-50.059) - Cour de cassation - Première chambre civile


Faits :

Un Marocain et un Français domiciliés en France souhaitaient se marier en septembre 2013 en Savoie. Seulement le ministère public s’est opposé à cette union, qui serait contraire à une convention franco marocaine signée le 10 août 1981.

Contexte juridique :
En droit français, le mariage entre personnes de même sexe est possible depuis la loi du 17 mai 2013 dite « loi autorisant le mariage entre personnes de même sexe » (article 143 du code civil). Selon l’article 202-2 du code civil, les règles de forme applicables aux mariages sont régies par la loi du lieu de célébration du mariage (« lex loci celebrationis »). Les règles de fond sont quant à elles régies par la loi nationale de chaque époux (article 202-1 du code civil). Toutefois, une exception est faite à ce principe à l’alinéa 2 de l’article 202-1, aux-termes duquel « deux personnes de même sexe peuvent contracter mariage lorsque, pour au moins l’une d’elles, soit sa loi personnelle, soit la loi de l’Etat sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence le permet. »
En revanche la France a signé plusieurs conventions, notamment une convention franco marocaine du 10 août 1981 relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire. Son article 5 dispose que : « Les conditions du fond du mariage tels que l'âge matrimonial et le consentement de même que les empêchements, notamment ceux résultant des liens de parenté ou d'alliance, sont régies pour chacun des futurs époux par la loi de celui des deux Etats dont il a la nationalité. » L’article 4 de ce même texte pose l’exception de l’ordre public à l’application de cette convention.

Procédure :
La Cour d’appel de Chambéry, saisie de cette affaire a statué en faveur des époux le 22 octobre 2013. Le Procureur général a formé un pourvoi en cassation contre cette décision. La première chambre civile de la Cour de cassation a dû statuer sur la question suivante : « Un Français peut-il épouser un Marocain nonobstant l’existence du traité franco-marocain ? », autrement formulé : L’ordre public français peut-il justifier l’absence d’application du traité franco-marocain, concernant un mariage homosexuel ? »

Décision et portée :
La Cour de cassation a rendu le 28 janvier 2015 sa décision. Elle y rejette le pourvoi formé par le ministère public. La Cour motive sa décision en affirmant que l’article 4 de la convention franco-marocaine autorise que son application soit écartée par l’ordre public d’un Etat partie. Elle estime donc que le droit de se marier, en France, pour des personnes de même sexe, est une « liberté fondamentale » qui relève de l’ordre public international français. Toutefois, la haute juridiction pose deux conditions pour écarter une loi étrangère dans ce cas :
- « il existe un rattachement du futur époux étranger à la France (dans cette affaire, le ressortissant marocain était domicilié en France)
- l’Etat avec lequel a été conclu la convention, n’autorise pas le mariage entre personnes de même sexe, mais ne le rejette pas de façon universelle. »

Cette jurisprudence de la Cour de cassation est intéressante à deux égards, d’une part en ce qu’elle affirme la position de la France quant au mariage entre personnes de même sexe au niveau international, et d’autre part en ce qu’elle se montre respectueuse de la loi étrangère en nuançant cette position (par les deux conditions qu’elle pose).

Liens
Arrêt de la Cour de Cassation du 28/01/2015
Communiqué de la Cour de cassation relatif à l'arrêt (à lire)

RL

1 commentaire:

  1. bonjour,
    je suis en première année droit et dois commenter cette arrêt.
    je pense commencer par la liberté de se marier ou la liberté fondamentale reconnue dans la déclaration de 1789(1), la hiérarchie des lois(2).
    qu'en pensez vous?

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