mardi 8 mars 2016

Précisions sur l’admission de la demande de report d’une procédure d’adjudication forcée


Précisions sur l’admission de la demande de report d’une procédure d’adjudication forcée

Arrêt numéro 14-26.908 de la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation,  rendu le 7 janvier 2016. Il s’agit d’un arrêt de cassation.

  1. Les faits

Sur des poursuites à fin de saisie immobilière exercées par la banque populaire d’Alsace à l’encontre de Madame X, le tribunal d’instance ordonne le 2 août 2013 l’adjudication forcée du bien immobilier de la débitrice Madame X.

La débitrice, agissant en qualité d’appelante, demande en appel à ce qu’il soit sursis à la procédure de vente forcée de son bien immobilier dans l’attente de l’issue de la procédure de traitement de sa situation de surendettement dont s’était saisie la Commission de surendettement.

La Cour d’Appel de Colmar accueille la demande de l’appelante par application de l’article L 331-3-1 du code de la consommation en acceptant le sursis jusqu’au 26 septembre 2014 au motif que la suspension de la procédure d’adjudication forcée découle de la décision de recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement de la débitrice par la Commission.

La Cour d’Appel fait une mauvaise application de l’article L 331-3-1 du code de la consommation puisqu’elle n’applique pas l’exception citée par l’article, qui prévoit que «  […] toutefois lorsqu’en cas de saisie immobilière la vente forcée a été ordonnée, le report de la date d’adjudication ne peut résulter que d’une décision du juge chargé de la saisie immobilière, saisi à cette fin par la commission, pour causes graves et dûment justifiées » alors qu’en l’espèce, il s’agit d’un bien immobilier dont la vente forcée a déjà été prononcée.

La Cour de Cassation doit se prononcer dans cet arrêt sur les formalités à respecter pour obtenir le report d’une procédure d’adjudication forcée ayant été décidée antérieurement à la saisine d’une Commission de surendettement afin qu’elle statue sur une situation de surendettement.

  1. Question de droit

Une débitrice peut-elle demander le sursis d’une procédure d’adjudication forcée ordonnée antérieurement à une décision d’acceptation de traitement de sa situation financière par une Commission de surendettement ?

  1. Solution de droit

La solution de la Cour de Cassation est particulièrement éclairante. La Cour de Cassation examine l’ordre chronologique des deux procédures et relève que la vente forcée du bien immobilier a été ordonnée avant que la Commission de surendettement ait  déclaré recevable la demande de traitement de la situation de surendettement de la débitrice.

Par conséquent en se fondant sur l’article 331-3-1 du code la consommation la Cour de Cassation casse l’arrêt de la cour d’Appel pour violation de la loi et rappelle que seule la Commission de surendettement et non la débitrice pouvait saisir le juge de la saisie immobilière d’une demande de report de l’adjudication pour causes graves et dument justifiées.

La Cour de Cassation rappelle dans cet arrêt, les formalités à respecter, à savoir l’existence de causes graves et dument justifiées ainsi que la saisine du juge de la saisie immobilière par la Commission de surendettement pour que la demande de report d’une adjudication forcée soit acceptée dans l’hypothèse où celle-ci est saisie de la situation financière de l’appelant après que la vente forcée ait été ordonnée.

Ce n’est pas la première fois que la Cour de Cassation se prononce sur ce point, bien qu’il y ait très peu d’arrêts récents sur la mesure de suspension des voies d’exécution en cas de saisie immobilière quand la vente forcée a déjà été ordonnée. Cela s’explique par le fait que, depuis 1998, la Cour de cassation assimile ces décisions aux ordonnances préparatoires du juge de la mise en état, et refuse de les examiner indépendamment du fond, c’est-à-dire des mesures de redressement prises à l’issue de la procédure.

En effet, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation , dans un arrêt en date du 29 septembre 2011, a affirmé que lorsqu’en cas de saisie immobilière la date d’adjudication a été fixée, la Commission peut, pour causes graves et dûment justifiées, saisir le juge de la saisie immobilière aux fins de remise de l’adjudication, par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre émargement au greffe, quinze jours au moins avant la date prévue pour la vente.

La deuxième chambre civile de la Cour de Cassation, précise dans un arrêt en date du 8 avril 1998 que le juge de l’exécution peut être valablement saisi d’une demande de suspension des procédures d’exécution diligentées contre le débiteur en application de l’article L 331-5 du code de la consommation, qu’à la double condition d’avoir été saisi avant la publication du commandement aux fins de saisie immobilière et de statuer  avant la fixation de la date d’adjudication.

Après la publication du commandement, seul le juge de la saisie qui est le juge de l’exécution est compétent.

Annexe : Article L 331-3-1 du code de la consommation : La décision déclarant la recevabilité de la demande emporte suspension et interdiction des procédures d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur ainsi que des cessions de rémunération consenties par celui-ci et portant sur les dettes autres qu'alimentaires. Les procédures et les cessions de rémunération sont suspendues ou interdites, selon les cas, jusqu'à l'approbation du plan conventionnel de redressement prévu à l'article L. 331-6, jusqu'à la décision imposant les mesures prévues par l'article L. 331-7, jusqu'à l'homologation par le juge des mesures recommandées en application des articles L. 331-7-1, L. 331-7-2 et L. 332-5, jusqu'au jugement prononçant un redressement personnel sans liquidation judiciaire ou jusqu'au jugement d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire. Cette suspension et cette interdiction ne peuvent excéder deux ans. Toutefois, lorsqu'en cas de saisie immobilière la vente forcée a été ordonnée, le report de la date d'adjudication ne peut résulter que d'une décision du juge chargé de la saisie immobilière, saisi à cette fin par la commission, pour causes graves et dûment justifiées

CT.

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