L’adoption définitive
La
proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le système
prostitutionnel a été adoptée en lecture définitive par l'Assemblée nationale
le 6 avril 2016 au terme de deux années de vifs débats. Ce vote, qui reprend un
engagement de François Hollande lors de sa campagne présidentielle de 2012, met
fin à un long parcours parlementaire commencé en décembre 2013.
Se prostituer n’est plus un délit
mais payer pour un acte sexuel le devient.
En effet, la loi abroge le délit de racolage (225-10-1
du code pénal) instauré par Nicolas Sarkozy en 2003. Par conséquent toutes les
références à l’article 225-10-1 au sein du code pénal sont supprimées et
celui-ci se trouve ainsi modifié du fait de l’abrogation du délit en question. Par
conséquent, la section 2 bis du chapitre V du titre II du livre II du code
pénal est ainsi modifiée :
- - Après le mot « prostitution la fin de l’intitulé
est supprimée
-
L’article 225-12-1 est ainsi rédigé :
« Lorsqu’il est commis en récidive
dans les conditions prévues au second alinéa de l'article 132-11, le fait de
solliciter, d'accepter ou d'obtenir des relations de nature sexuelle d'une personne
qui se livre à la prostitution, y compris de façon occasionnelle, en échange
d'une rémunération, d'une promesse de rémunération, de la fourniture d'un
avantage en nature ou de la promesse d'un tel avantage est puni de 3 750 €
d'amende.
Est puni de
trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende le fait de solliciter,
d'accepter ou d'obtenir, en échange d'une rémunération, d'une promesse de
rémunération, de la fourniture d'un avantage en nature ou de la promesse d'un
tel avantage, des relations de nature sexuelle de la part d'une personne qui se
livre à la prostitution, y compris de façon occasionnelle, lorsque cette
personne est mineure ou présente une particulière vulnérabilité, apparente ou
connue de son auteur, due à une maladie, à une infirmité, à un handicap ou à un
état de grossesse. «
-
Aux premier et dernier alinéas de
l'article 225-12-2, après le mot : « peines », sont insérés
les mots : « prévues au dernier alinéa de
l'article 225-12-1 » ;
-
À l'article 225-12-3, la
référence : « par les articles 225-12-1 et » est remplacée
par les mots : « au dernier alinéa de l'article 225-12-1 et à
l'article
-
À la troisième phrase du sixième alinéa de
l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles, la
référence : « 225-12-1 » est remplacée par les références :
« au dernier alinéa de l'article 225-12-1 et aux
articles 225-12-2 ».
Parallèlement à l’abrogation du délit de racolage la
loi instaure une contravention de cinquième classe sanctionnant le recours à la
prostitution dans son article 20.
Concrètement est puni « Le fait de
solliciter, d’accepter ou d’obtenir des relations de nature sexuelle d’une
personne qui se livre à la prostitution, y compris de façon occasionnelle, en
échange d’une rémunération, d’une promesse de rémunération, de la fourniture
d’un avantage en nature ou de la promesse d’un tel avantage est puni de
l’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe«. Autrement dit le texte pénalise
désormais les clients de prostituées passibles d'une amende de 1 500 € et de 3
750 € d'amende en cas de récidive. Une peine complémentaire de « suivi d'un
stage de sensibilisation aux conditions d'exercice de la prostitution » est
également créée.
L’accompagnement des prostituées
A la suite des travaux de la
Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et
les femmes de l’Assemblée nationale, la proposition de loi
tend à mettre à place un nouveau dispositif de lutte contre la prostitution.
Pour cela, les mesures prévues sont
les suivantes :
Pour les personnes victimes de la prostitution, le
texte prévoit le droit de bénéficier d'un système de protection et d'assistance
et met en place un parcours de sortie de la prostitution. Une instance chargée
d'organiser et de coordonner l'action en faveur des victimes de la prostitution
et de la traite des êtres humains sera créée au sein des conseils
départementaux.
Un fonds dédié à la prévention de la prostitution et à
l'accompagnement social et professionnel des personnes prostituées doit être
mis en place.
En contrepartie, les personnes étrangères engagées
dans un parcours de sortie de la prostitution se verront délivrer une
autorisation provisoire de séjour d'une durée de six mois.
L'abrogation du délit de racolage entrera en vigueur
six mois après la promulgation de la loi.
Quatre passages devant l’assemblée
Le texte a été approuvé par 64 voix contre 12 et 11
abstentions, mais il a divisé sur presque tous les bancs. Si les députés PS et
Front de gauche le soutenaient dans l’ensemble, une majorité des Républicains
penchaient pour l’abstention, alors que l’UDI avait laissé la liberté de vote.
Une majorité des radicaux de gauche et des écologistes étaient également
défavorables au texte.
Il s’agissait du quatrième et dernier passage de cette
proposition de loi devant l’Assemblée. Le Sénat avait en effet auparavant à
chaque fois rejeté ce texte, mais les députés avaient le dernier mot.
Une avancée
majeure pour le droit des femmes
La suppression du délit de racolage et la pénalisation des clients de
prostituées sont deux avancées majeures pour les droits des femmes. Députés et
sénateurs n’ont jamais réussi à se mettre d’accord sur la principale mesure du
texte, la pénalisation des clients. Mais, in fine, ce sont les députés qui
auront le dernier mot et imposeront cette mesure.
« L’achat
d’acte sexuel » sera
sanctionné par une amende de 1 500 euros maximum. En cas de récidive,
celle-ci pourra s’élever à 3 750 euros.
Le texte,
inspiré de Suède, qui pénalise les clients depuis 1999, crée aussi une peine
complémentaire sous la forme d’un stage de sensibilisation aux conditions de la
prostitution.
En pénalisant les clients de
prostituées, le législateur met la France en cohérence avec la loi de 1981
sanctionnant le crime de viol défini comme « un acte
de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la personne
d'autrui, par violence, contrainte, menace ou surprise »
L'Assemblée Nationale a
en effet reconnu aujourd'hui que la pénétration sexuelle contre argent est de
nature contrainte ; donc que la prostitution constitue une violence, et qu'il
est ainsi logique que l'auteur de cette relation sexuelle imposée -le
"client"- soit pénalisé.
La France devient ainsi le cinquième
pays européen à pénaliser les clients de prostituées, après la Suède, pionnière
dès 1999, la Norvège, l’Islande et le Royaume Unie.
TC
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