mardi 19 janvier 2016


La procédure de divorce en présence de demandes concurrentes

Arrêt numéro 14-29322 de la première chambre civile de la Cour de Cassation, rendu le 16 décembre 2015. Il s’agit d’un arrêt de cassation.

I-                   Les faits

Un époux assigne sa femme en divorce pour altération définitive du lien conjugal. A titre principal, l’épouse conclut au rejet de la demande et à titre subsidiaire elle fait une demande reconventionnelle pour le prononcé du divorce aux tors exclusifs de son mari.
La Cour d’Appel de Rennes prononce, conformément à la demande présentée par le demandeur, le divorce pour altération définitive du lien conjugal au motif que la demande reconventionnelle pour le prononcé du divorce pour faute est subsidiaire. La Cour estime que les deux demandes en divorce ne sont pas des demandes concurrentes au motif que la demande de l’épouse pour le prononcé du divorce pour faute, est faite à titre subsidiaire.

La Cour de cassation doit se prononcer dans cet arrêt sur l’ordre procédural à appliquer à deux demandes en divorce lorsque l’une d’elles, la demande en divorce pour faute, est faite à titre subsidiaire.

II-                 Question de droit

L’article 246 du code civil est – il applicable lorsque la demande en divorce pour faute est faite à titre subsidiaire lors d’un procès ?

III-              Solution de la Cour de Cassation

La solution de la Cour de Cassation est particulièrement éclairante : « Alors que selon l'article 246 du code civil, si une demande pour altération définitive du lien conjugal et une demande pour faute sont concurremment présentées, le juge examine en premier lieu la demande pour faute et que ce n'est que s'il rejette celle-ci qu'il peut se prononcer sur la demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal ; qu'il en va ainsi même si la demande reconventionnelle en divorce pour faute est présentée à titre subsidiaire »  

Cette solution appelle  deux observations

D’une part, la Cour de Cassation en cassant l’arrêt rendu par la Cour d’Appel, réaffirme dans un premier temps le contenu de l’article 246 du code civil.

En effet, la Cour de Cassation rappelle que dans le cas d’une demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal et une demande pour faute présentées concurremment, le juge doit examiner en premier lieu la demande en divorce pour faute et ce n’est que lorsque celui-ci rejette la demande pour faute, qu’il statue sur la demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal.

Mais la Cour de Cassation innove également dans cet arrêt, puisqu’elle affirme la primauté de l’examen de la demande en divorce pour faute bien que cette demande soit subsidiaire.

D’autre part, la Cour de Cassation opte pour une interprétation large des demandes concurrentes, puisqu’en appliquant l’article 246 du code civil à la demande en divorce pour faute faite à titre subsidiaire, elle considère que même à titre subsidiaire, cette demande en divorce est concurrente à la demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal.

Dans cette affaire, l’épouse qui agit en qualité de défenderesse au moment de l’assignation, conclut, à titre principal, au rejet de la demande et à titre subsidiaire, elle émet à son tour, contre le demandeur initial, une prétention propre par voie de conclusion, à savoir le prononcé du divorce pour faute aux torts exclusifs de son époux.
Sa demande correspond à une demande reconventionnelle, elle ne saisit pas à nouveau le juge qui est déjà saisi et doit avoir un lien de connexité suffisant avec la demande initiale. En l’espèce c’est le cas, puisque sa demande vise à contester la demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal.

La Cour de Cassation estime que cette demande reconventionnelle équivaut à une demande concurrente, puisqu’elle applique l’article 246 du code civil à cette affaire.

T.C

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